Le carpocapse des pommes

Même si le mot ne lui dit rien, même si la tête des « individus » lui est inconnue, tout arboriculteur a déjà subi les dégâts de ces hôtes indésirables des vergers. Les carpocapses, ce sont ces « charmants » papillons de nuit dont les larves (chenilles), avec beaucoup d’application et d’acharnement, passent leur temps à creuser des galeries dans les fruits. Autrement dit, c’est la plaie des arboriculteurs qui, chaque automne, voient des fruits véreux tomber prématurément sous leurs arbres.

1. Biologie de l’espèce

Un peu de science… Le carpocapse des pommes, Cydia pomonella L. (il en existe d’autres), est un insecte lépidoptère (papillon) aux mœurs nocturnes. Il est de couleur grise et mesure de 18 à 20 mm d’envergure.

A notre latitude, deux générations par an se chevauchent plus ou moins. Le premier vol apparaît quand la somme des températures nocturnes atteint un certain seuil. (Habituellement au début mai dans notre région, mais ça dépend des années !) Après fécondation, les femelles pondent leurs œufs (de 50 à 80) sur les rameaux, les feuilles ou les fruits. 9 à 15 jours plus tard, selon la température, ces œufs donnent naissance à des larves qui partent à la recherche d’un fruit pour s’y installer. C’est le « stade baladeur ». Dès qu’elles en ont trouvé un, elles percent l’épiderme et creusent une galerie en direction du centre. Là, elles continuent leur développement, ce qui provoque la chute des fruits atteints. Cette phase larvaire dure de 20 à 30 jours.

La phase suivante est la nymphose : la larve quitte le fruit, cherche un abri et s’entoure d’un cocon dans lequel elle se développera pour donner naissance à un insecte adulte. Selon la date et la température, les larves « nymphosées » peuvent entrer en diapause et donner naissance à un papillon seulement au printemps suivant ou alors elles peuvent donner naissance à une deuxième génération, la même année.

2. Dégâts

Souvent au point de contact entre deux fruits ou entre une feuille et un fruit ou même de n’importe quel point du fruit, la jeune larve (chenille) creuse une galerie et s’installe au centre de la pomme. Elle consomme les pépins et rejette ses excréments dans la galerie de pénétration et même parfois à l’extérieur. L’absence des pépins accélère la maturation des fruits qui prennent précocement leurs teintes définitives et tombent de l’arbre.

Bien sûr, la qualité de ces fruits est considérablement diminuée (voire nulle). Ils sont souvent envahis par la moniliose (maladie due à un champignon microscopique) et n’ont aucune conservation. On peut tout juste en faire de la compote après élimination des parties atteintes. La larve de ce carpocapse est également friande de poires, coings, noix et abricots.

3. Lutte

Les dégâts de la première génération se produisent sur de jeunes fruits et passent inaperçus car ils se produisent en même temps que la chute physiologique naturelle. Ils contribuent à un éclaircissage pouvant être bénéfique pour les fruits qui restent.

Par contre, il est utile de lutter contre la deuxième génération afin de protéger les fruits qui constitueront la récolte de l’année. Cette lutte n’est pas facile car l’amateur dispose difficilement de produits ovicides (qui détruisent les œufs) et les insecticides anti-chenilles classiques n’atteignent pas les larves quand elles sont à l’intérieur des fruits. Il faudrait agir au stade « baladeur » mais, pour l’amateur toujours, ce n’est pas évident à détecter.

a) Lutte préventive

Les non-professionnels que nous sommes peuvent cependant se livrer à quelques actions préventives afin de limiter les dégâts.
En hiver, il semblerait qu’un badigeonnage des troncs et des grosses branches (les charpentières) avec de la chaux peut emprisonner les cocons réfugiés dans l’écorce.

La pose de nichoirs dans le verger est aussi bénéfique car un couple d’oiseaux (ou de chauves-souris) capture des centaines de chenilles et de papillons pour s’alimenter ou pour nourrir leur progéniture. On remarque que dans les prés-vergers, où le bétail mange les fruits tombés, et dans les poulaillers, où la volaille gratte le sol et consomme vers et larves, les carpocapses sont moins nombreux.

Enfin, toutes les variétés de fruits n’ont pas la même sensibilité au carpocapse. Implantez dans votre verger des fruits offrant une bonne résistance à ce ravageur. Aucune variété n’offre une résistance totale, mais, par exemple, Reine des Reinettes et Calleville de Dantzig sont assez sensibles, alors que Rayotte de Nommay ou Orange Suisse sont rarement véreuses.

b) Lutte biologique

En cours de végétation, la pose, sur le tronc, de bandes de carton ondulé de 15 ou 20 cm de large offre des refuges aux larves pour qu’elles s’y installent afin d’y tisser leur cocon. Il suffit ensuite de brûler ces bandes de carton tous les quinze jours pour détruire les futurs carpocapses. 
Le ramassage et la destruction des fruits véreux suppriment également les larves si elles n’avaient pas encore quitté leur fruit.


On peut également installer dans le verger des pièges à phéromones sexuelles (substances secrétées par les femelles pour attirer les mâles). Ce sont de petites « cabanes », au fond englué où les mâles leurrés viennent se coller et de ce fait ne peuvent plus féconder les femelles. Ces pièges, conçus au départ pour les professionnels afin de déterminer la date des premiers vols, limitent les populations de carpocapses dans les vergers d’amateurs. Les jardineries commencent à proposer ces pièges à leurs clients. 

Si vous vous décidez à en utiliser, posez les de préférence loin des pommiers afin d’en éloigner les carpocapses. Il existe des capsules contenant des phéromones destinées à protéger pommiers, poiriers et noyers et des capsules destinées aux carpocapses des prunes. Attention, choisissez les bonnes.

Pour information, il existe, à destination des professionnels, une méthode de lutte dite par « confusion sexuelle » qui utilise ce principe : des lanières imbibées de ces phéromones sont judicieusement placées en de multiples endroits du verger, si bien que les mâles, sollicités de toutes parts « papillonnent » (c’est le cas de le dire) en tous sens, sans trouver les femelles pour les féconder. On pourrait imaginer copier cette méthode en posant dans nos vergers plusieurs pièges destinés aux amateurs, mais vu le coût élevé des capsules de phéromones (plus de 10 € l’unité), cela est difficilement envisageable.

En remplacement des anti-chenilles classiques, il existe « Carpovirusine », insecticide contenant un virus s’attaquant exclusivement aux carpocapses en leur donnant une maladie fatale appelée « granulose ». Un insecticide naturel issu de bactérie, le Spinosad, peut aussi être utilisé, il n’est cependant pas spécifique aux carpocapse. Mais il est difficile de se procurer ces produits à des doses et des concentrations adaptées aux vergers d’amateurs, et il faut les utiliser au stade baladeur de la larve.

c) Lutte chimique

En hiver, pulvériser des huiles blanches parafiniques afin de détruire les cocons qui hivernent sous les écailles de l’écorce. Malheureusement, cela n’a pas d’effet sur ceux qui hivernent dans le sol. Par ailleurs, ces produits ne sont pas homologués en Suisse.

De nombreux insecticides anti-chenilles existent dans le commerce. L’idéal, dans ce cas, est de déterminer le stade d’application optimal de traitement grâce aux captures effectuées par le piège à phéromones. Ces insecticides sont cependant non sélectifs et éliminent également les insectes auxiliaires du verger !

Attention, ces produits sont dangereux pour l’Homme et l’environnement. Bien lire la notice sur l’emballage et respecter les consignes avant de les utiliser.

En appliquant ces diverses mesures, vous devriez parvenir à limiter les populations de carpocapses à des seuils tolérables vous permettant de profiter d’un maximum de fruits sains dans votre verger. Retour ligne automatique

Pour en savoir plus…

Ouvrages consultables à Vergers Vivants (F) ou à la Fédération Rurale Interjurassienne (CH) : 
–  Maladies et ravageurs au verger (Brochure technique) – Les Croqueurs de pommes
 - Maladies et Ravageurs de nos Vergers – Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil 
–    Ravageurs et maladies au jardin, les solutions biologiques – O. Schmid et S. Henggeler (Ed. Terre Vivantes)

Sites Internet : 
–    www.agrometeo.ch 
–   www.inra.fr/internet/Produits/HYPPZ/ravageur.htm 
–    www.inra.fr/internet/Produits/HYP3/noms.html

Conseils de Vergers Vivants (F) 

Réalisé dans le cadre du Programme de coopération territoriale européenne INTERREG IV France-Suisse 2007-2013

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