La biodiversité dans les vergers haute-tige

Le verger haute-tige, milieu semi ouvert, fait certainement partie des écosystèmes agricoles les plus riches d’un point de vue biologique. En effet, depuis leur plantation jusqu’à leur décomposition complète, les arbres fruitiers offrent nourriture, abris, lieux de reproduction et d’hivernage à un grand nombre d’espèces animales, végétales (lichens, mousses, etc.) et de champignons. En outre, les nombreuses variétés fruitières et la strate herbacée (prairie) contribuent également à la biodiversité de ce milieu semi-naturel. Soulignons que la biodiversité ne dépend pas uniquement des caractéristiques du verger ou de son entretien, mais également de son environnement direct (prairies, forêts, haies, champs, routes, etc.).

1. Les principaux habitats naturels

Un verger présente une multitude d’habitats favorables à de nombreuses espèces animales et végétales. Afin de contribuer à leur maintien, il est possible de mettre en place des habitats artificiels, tels les nichoirs à oiseaux (chevêche d’Athéna, rouge-queue à front blanc, etc.) ou à insectes (abeilles sauvages, guêpes, etc.).

la grive litorne apprécie les fruits pendant l’hiver

a) Arbres morts ou sénescents, branches mortes

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Les arbres morts ou au stade sénescent (vieillissant) ainsi que les branches mortes sont très intéressants pour les animaux cavernicoles (Chevêche d’Athéna, rouge queue à front blanc, huppe fasciée, chauve-souris arboricole, loir, lérot…) et/ou les insectes xylophages (coléoptères, syrphidés…), en raison de la diversité de cavités qu’ils proposent. Un grand nombre de champignons apprécient également ce milieu.

Les cavités de pied se présentent sous la forme d’ouvertures au ras du sol qui se prolongent vers le haut (comme une cheminée), souvent dues à une blessure infligée par le bétail ou lors des travaux d’entretien. Elles favorisent les coléoptères, hyménoptères, petits mammifères, champignons ….

Les cavités du tronc, de manière générale, proviennent de la cassure d’une branche charpentière, sous l’effet de vents violents ou sous le poids des fruits, qui arrache une portion de tronc. Si la blessure est profonde, elle ne cicatrise jamais. Les cavités se creusent et se remplissent petit à petit de terreau sous l’effet d’organismes saproxyliques ou par creusement par des pics qui exploitent la faiblesse du bois. Elles sont favorables aux oiseaux et coléoptères cavernicoles, petits mammifères, gastéropodes…

Les cavités du sommet du tronc résultent de la fracture d’une branche maîtresse au-dessus de son point d’insertion sur le tronc. La pourriture du bois induite par la blessure suit le processus suivant : un moignon de branche encore solidaire avec le reste de l’arbre empêche la cicatrisation. La dégradation de ce moignon laisse apparaître une petite cavité qui va s’agrandir sous l’effet des champignons et parfois par des pics. Ensuite, le volume de la cavité et la quantité d’humus augmentent et finissent par former une colonne de décomposition qui s’enfonce dans le tronc jusqu’au sol. Finalement, l’arbre complètement creux finit par s’ouvrir. L’arbre ainsi réduit à un demi cylindre peut rester encore longtemps dressé et porter feuilles et fruits. Ce type de cavité est colonisé par des coléoptères et hyménoptères xylophages et/ou cavernicoles, des araignées, des myriapodes….

Les arbres morts offrent également refuge à certains invertébrés (cloportes, myriapodes et insectes) dans les fissures, derrière leur écorce et dans le terreau résultant de la décomposition du bois.

b) Houppiers

Les houppiers servent principalement de support à la nidification d’oiseaux (verdier d’Europe, corneille, merle, pinson des arbres…), de postes de chant, de perchoirs ou de ressource de nourriture. La floraison est une formidable source de nectar et de pollen profitant aux papillons et aux abeilles sauvages et domestiques.

c) Structures annexes

Les structures annexes ou d’accompagnement ont des formes très diverses (tas de bois, de pierres, mares, bandes herbeuses, haies…) et contribuent au maintien et à l’accroissement de la biodiversité en offrant supports, abris et nourriture. Cette diversité animale crée un équilibre écologique ; la présence d’espèces auxiliaires limite les attaques de ravageurs (prédation, parasitisme).

Tas de pierres et mur de pierres sèches : ces microclimats variés (chaud et sec, humide et frais…) favorisent la colonisation de nombreuses espèces animales (reptiles, insectes, batraciens, micromammifères,…) et végétales (fougères, mousses, plantes pionnières…) Ils sont particulièrement importants pour les belettes et hermines, toutes deux grandes auxiliaire du verger car prédatrices de campagnols.

Tas de bois et poteaux en bois offrent une structure protectrice, un perchoir pour la chasse (poteaux pour la Chevêche d’Athéna ou le rouge queue à front blanc) et une réserve de nourriture (insectes, mollusques…), servant aux oiseaux (troglodyte mignon, rouge-gorge), aux batraciens (crapaud commun, grenouille rousse…) et à certains mammifères (hérissons, mulots).

Haies, buissons, bosquets, arbres isolés sont des éléments paysagers importants qui jouent un rôle de « coupe vent », de « zone relais » lors du déplacement de la faune, de source de nourriture, de lieux de reproduction et de protection pour beaucoup d’animaux (mammifères, oiseaux, invertébrés, batraciens, reptiles). De plus, la zone tampon longeant la haie est un élément important pour la diversité végétale dont la composition varie selon l’exposition (sud, sud-est…).

Les chemins non revêtus contribuent à la diversité botanique tout en offrant un terrain de chasse (pour les insectes et les oiseaux) et une source de nourriture (pour les insectes herbivores).

Les prairies sont propices aux orthoptères (sauterelles, criquets, grillons…) et aux micromammifères (campagnols, souris), source de nourriture primordiale pour la Chevêche d’Athéna qui est très menacée (présente dans les cantons du Jura et de Genève et très rare dans le Pays de Montbéliard).

2. L’importance pour la faune

La grande richesse faunistique des vergers à hautes tiges représente toutes les classes d’animaux terrestres : vers, gastéropodes, arachnides, crustacés, myriapodes, insectes, amphibiens, reptiles, mammifères et oiseaux. Il n’y a pas de faune réellement inféodée aux vergers, mais l’importante diversité s’explique par l’hétérogénéité de cet écosystème.

3. L’importance pour la flore

Les éléments de structures (haies, buissons…) constituent un milieu propice pour les plantes à fleurs de certaines formations végétales (lisière, forêt, prairie de fauche, ourlet forestier, milieu rudéral…). Cette diversité est encore accentuée en fonction de la nature du sol, de la gestion de la strate herbacée ou encore de l’entretien mis en place.

Pour nous, humains, le verger est avant tout un lieu de production de fruits dont on se délecte sans modération. Les autres espèces présentes dans nos arbres fruitiers nous semblent souvent de féroces concurrentes. En y regardant de plus près, elles vivent tout simplement, et bon nombre d’entre elles sont de précieux alliés qui nous permettront d’éviter des traitements nocifs à notre environnement et à notre santé. Il est très intéressant de prendre conscience que ce milieu naturel dont on est responsable constitue un refuge pour des plantes, des animaux, des champignons… et participe au respect de chaque espèce, au respect de « mère nature ».

Télécharger ce questionnaire et évaluer la valeur écologique de votre verger !

L’appréciation de la valeur écologique d’un verger haute tige est utile pour connaître les éventuelles « lacunes » du verger et ainsi trouver des moyens de les combler. L’évaluation se réalise d’une part à l’aide d’un travail d’observation annuel et d’autre part, d’un suivi sur plusieurs années afin de connaître l’évolution de la qualité écologique. Il est donc nécessaire de définir des critères qui englobent les éléments importants appartenant au verger.

Quelques idées d’aménagement dans votre verger

Accueillir un maximum de biodiversité, c’est offrir la plus grande variété d’habitats possibles pour satisfaire aux exigences du plus grand nombre d’espèces. Retour ligne automatique
La notion de verger ou de terrain « propre », rasé régulièrement de près n’est donc pas la plus propice à la biodiversité. Préférez l’aménagement d’une mosaïque d’habitats, par exemples :

  •   Mettre en place un maximum de petites structures aux alentours du verger : haies, tas de bois et de pierres, jachères florales…
  •   Favoriser un entretien extensif pour les prairies déjà existantes.
  •   Poser des nichoirs à oiseaux et à abeilles sauvages.
  •   Replanter des arbres et veiller à leur entretien (protéger des rongeurs et éviter la pâture les premières années).
  •   Favoriser la diversité des variétés lors de la plantation.
  •   Favoriser, à proximité des vergers, la présence d’autres milieux sans fumure ni traitement.

Exemple de nichoir ou de gite à insecte

  • Pour en savoir plus…
Ouvrages consultables à Vergers Vivants (F) ou à la Fondation Rurale Interjurassienne (CH) : 
–  Le pré-verger pour une agriculture durable – F. Coulon, P. Pointereau, I. Meiffren (Ed. Solagro) 
–  Les vergers traditionnels et les alignements d’arbres têtards – JL Coppée, C. Noiret

Sites Internet 
–  www.lesbocages.be
–  www.birdlife.ch/f/downloads.php
–  www.roc.asso.fr/biodiversité/index.html

Conseils à la Fondation Rurale Interjurassienne (CH) et à Vergers Vivants

Crédits photos : FRIJ, Claude Nardin, François OLLIET.

Réalisé dans le cadre du Programme de coopération territoriale européenne INTERREG IV France-Suisse 2007-2013

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